Artiste vs Graphiste

Tout part donc d’une commande, avec un brief créatif à respecter (appelé aussi cahier des charges) et un message à délivrer auprès d’un public ciblé.

« Artiste : personne qui exerce professionnellement un des beaux-arts ou, à un niveau supérieur à celui de l’artisanat, un des arts appliqués. Personne qui a le sens de la beauté et est capable de créer une œuvre d’art. »

Quand on pense « Graphiste », la plupart des gens ont tendance à penser que c’est un « artiste », mais ce n’est pas le cas. Évidemment, cela n’a rien d’incompatible, et il y a de grandes chances que se cachent parmi les graphistes plus d’artistes que dans la plupart des professions, en raison de leur sensibilité artistique. MAIS  il y a une distinction importante à faire entre Arts plastiques et Arts appliqués.

une créativité encadrée

Pour les arts plastiques, bien souvent, l’acte de création part d’une inspiration personnelle, sans aucune contrainte ni préoccupation commerciale.

Les arts appliqués, désignent eux aussi une création artistique, mais dans le cadre d’une production commerciale.

Avoir carte blanche : un cadeau empoisonné !

Il existe une idée reçue selon laquelle le designer aime avoir carte blanche. La réalité est toute autre : la créativité a besoin d’être stimulée ! Pour amorcer un brainstorming, on part toujours d’un mot, d’une idée, d’une valeur… Chaque concept en amène un nouveau et on arrive à des idées de plus en plus riches. Mais sans point de départ, c’est souvent le néant !

 

La clé de la réussite !

On en arrive ainsi à une étape essentielle de la création graphique trop souvent négligée : l’élaboration du brief créatif. Ce document qui permet aux créatifs de comprendre ce que le client attend de lui. Il est l’élément indispensable à une bonne relation client/prestataire, car il permet de poser des bases sur lesquelles chacun pourra se référer tout au long du projet. En somme, c’est l’ensemble du processus de dialogue et de questionnement en amont de tout projet.

Le réel savoir-faire des créatifs est d’être capable de répondre visuellement à une problématique de communication. Et comment donner une réponse s’il n’y a pas de problématique ? Le travail d’un designer, c’est de jouer avec les codes graphiques, la sémiologie des formes, des couleurs, des typographies, pour pouvoir retranscrire au mieux l’image qu’il souhaite donner à une marque. Rien n’est laissé au hasard. Pour cela, le brief créatif se doit d’être exhaustif et documenté. Il synthétise à l’écrit les demandes, les objectifs, les besoins et les contraintes du client, et devient le document de référence pour toutes les décisions graphiques, esthétiques et ergonomiques du projet. C’est en quelque sorte le fondement du processus de création.

À ce titre, le brief créatif permet d’appuyer la direction artistique sur des critères objectifs et que tous les intervenants puissent s’appuyer sur les mêmes critères de jugement. Les « J’aime » ou « J’aime pas » sont des notions avec lesquelles nous devons évidemment composer, mais un design bien pensé, dont les choix sont justifiés et adaptés à la problématique de communication, permettent d’anticiper les remarques subjectives. Se demander si la personne qui « n’aime pas » est une personne « dans la cible », c’est déjà se poser la première bonne question.

La cible au cœur de toutes les préoccupations

S’il y a une chose qu’il faut toujours garder en tête lors de la mise en place de votre stratégie de communication, c’est de définir précisément le public à qui s’adresse votre projet. En d’autres mots, pour qui communiquez-vous ? Car on ne crée pas un design pour se faire plaisir et on ne fait pas le choix d’une couleur juste parce que c’est notre couleur préférée.

Message, ton graphique, code couleur, iconographie ou typographie, rien n’est imaginé au hasard. Tout est évalué, pesé, justifié, pour toucher celui qui est le vrai client final. Ainsi vous n’utiliserez pas les mêmes codes selon si la cible à qui vous vous adressez est par exemple un sénior, un enfant ou un professionnel…

Prenons l’exemple de chocolatiers

Chacune des marques ci-dessous touchent des publics différents, grâce à des positionnements stratégiques réfléchis, des univers de marque très marqués et des codes graphiques judicieusement utilisés.


Le Chocolat des Français : du « made in France » assumé.


Chocolat Mason & Co : production responsable et artisanale.


Chocolat Beau Cacao : marque haut-de-gamme.

Sans positionnement ni stratégie, pas de brief créatif !

Le positionnement est certainement la chose la plus difficile à mettre en place dans la création d’une entreprise. Le brief créatif ne peut être rédigé qu’une fois le positionnement précisément défini et validé.

Même si nous pouvons accompagner le client, nous ne sommes pas là pour faire le travail à sa place. Personne n’est mieux placé que le client lui-même pour parler de son produit ou de son service. Le graphiste est là pour créer un univers visuel et pertinent autour de ce positionnement, pour que l’image perçue par le consommateur corresponde en tous points à celle que le client souhaite donner à sa marque.

Plus le positionnement est précis, plus le client gagne du temps, de l’argent et plus le résultat est efficace. De même, plus un brief est complet, plus on a de matière pour travailler et moins on y consacre de temps. Pour autant, faire attention de ne pas être noyé par trop d’informations. Ne demandez au client que ce qui est nécessaire pour lui proposer des solutions créatives et pertinentes !

 

Comment rédiger un bon Brief ?

La rédaction d’un brief clair et complet n’est pas si évidente que ça. Ce qui suit va vous aider dans ce processus.

La marque

Il s’agit de définir l’entreprise ou l’organisation dans toutes ces dimensions, en reprenant la plateforme de marque si elle existe. Décrivez l’activité de l’entreprise et ce qui fait la personnalité de la marque. Soyez spécifique en parlant des produits ou services, mais ne racontez pas l’historique entier de l’entreprise, sauf si c’est pertinent pour votre projet.

Les valeurs de la marque

Le design est en grande partie lié aux valeurs de la marque. Attention, je ne parle pas de mettre des valeurs juste « parce que ça fait bien ». Il faut pouvoir les justifier réellement. Plus les valeurs ont du sens, plus il sera facile pour vous de les traduire graphiquement.

Les points forts de la marque

Qu’est-ce qui fait l’ADN et la valeur ajoutée d’une entreprise ? Qu’est-ce qui la différencie de ses concurrents ? Si vous proposez une solution différente, ou quelque chose d’innovant, il faut que ce soit l’argument principal de la stratégie de communication. Réfléchissez bien à ce qui rend unique la marque et le ton visuel suivra.

Le public cible

Encore une fois, il est important de définir précisément la cible, les personnes que vous souhaitez toucher et à qui s’adresse votre projet. Sexe, âge, catégorie socio-professionnelle, habitudes de consommation, canal d’acquisition, etc… Soyez aussi précis que possible sur tout ce qui peut vous sembler pertinent. Si elles existent, des études pourront être communiquées en annexe.

Les objectifs de communication

On ne communique pas de la même manière selon l’objectif que l’on souhaite atteindre. Expliquer clairement ce que le client souhaite accomplir au travers de son projet. Par exemple :

  • Augmenter la capital sympathie de la marque ?
  • Relancer les ventes d’un produit ?
  • Faire un travail de pédagogie auprès de sa clientèle ?
  • Réaliser une campagne promotionnelle ?
  • Communiquer sur un évènement ponctuel ?
  • Etc…
La concurrence

La veille concurrentielle est importante car elle détermine le positionnement d’une entreprise par rapport à ses concurrents : c’est-à-dire ceux qui évoluent sur le même marché et qui s’adressent à la même cible que vous. Relevez ce que vous considérez comme efficace chez les autres, ou au contraire ce qu’il faut éviter à tout prix, et si possible expliquez pourquoi. Devez-vous vous démarquer totalement ou rester très proche de ces codes ? Il peut parfois être pertinent de prendre le contre-pied des concurrents en communiquant sur de la valeur ajoutée, mais des fois pas, à décider avec le client !

Le ton visuel

Les sites tels que Pinterest, Behance, Dribble, Awwards… sont une formidable source d’inspiration, très utiles dans cette démarche. Identifiez les éléments qui vont vous être utiles : les couleurs, les typos, le style graphique, un type d’illustration… et rassemblez autant de designs différents que possible à présenter au client. Le but sera de définir tout ce qui retient son attention, mais aussi, tout ce qu’il n’aime pas.

Le fonctionnement
  • Livrables : répertoriez tout ce dont vous avez besoin (textes, logo, visuels, contraintes techniques…), y compris le type de fichiers et la méthode de partage que vous comptez utiliser.
  • Planning : renseignez la date à laquelle vous devez rendre les livrables et déterminez un planning avec le client si besoin.
  • Budget : Indiquez le montant maximum alloué au projet.
  • Interlocuteurs : déterminez le circuit de décision, le chef de projet, les différents intervenants… et notez les coordonnées de chacun.

 

Qui formalise le brief ?

Un brief de design est rédigé à travers un partenariat étroit et direct entre le responsable du projet et un membre de l’équipe design. Le reste de l’équipe peut fournir une contribution et l’approuver, sans toutefois contribuer directement à sa rédaction.

 

Dans quel format ?

Un brief de design doit être écrit, pour éviter toute ambiguïté. Qu’il soit entièrement rédigé dans un document texte ou sous la forme d’une liste à puces dans une présentation, l’important est de le rendre lisible et suffisamment complet. Ce document peut être ensuite présenté lors d’une réunion entre l’équipe créative et le client (ou les product managers).

 

En bref

Il est vrai, la mise en place d’un brief créatif peut parfois prendre du temps, mais c’est un document précieux. Dans la réalité, peu de clients ont déjà fait ce travail avant de vous contacter. D’où le fait de pouvoir les accompagner et les aider à ne rien oublier. Prenez l’habitude de leur envoyer un questionnaire à remplir qui synthétise toutes les informations dont vous avez besoin pour commencer à travailler. Cela aide à mieux comprendre leur projet et leurs enjeux. C’est également une base de travail pour la suite car c’est ce qui permet de définir une estimation du temps de travail et donc d’un devis.

 

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D’après un article de Audrey Lorel (www.audreylorel.fr).